Rapatriement, vols domestiques et internationaux, classement des compagnies aériennes… Le porte-parole d’Air Algérie nous dit tout

Amine Andaloussi est le porte-parole de la compagnie nationale Air Algérie. Dans cet entretien, il revient sur plusieurs sujets d’actualité, notamment la réouverture de l’espace aérien aux vols internationaux, les opérations de rapatriement ou encore le classement du pavillon national sur la scène internationale.

Le site spécialisé Airline Ratings a rendu public, lundi 4 janvier, son classement des compagnies aériennes les plus sûres au monde pour l’année 2021. Le pavillon national est très mal classé. Quel commentaire faites-vous? 

Concernant ce sujet, il faut savoir qu’il existe des lobbies qui investissent dans ces sites de classement. L’objectif étant de bien classer certaines compagnies au détriment d’autres. Pour ce qui est d’Air Algérie, elle est certifiée depuis 2006 par l’IATA OperationalSafety Audit Programme, appelé communément IOSA.

Globalement, c’est un système d’évaluation internationalement reconnu et accepté. Il évalue les systèmes de gestion et de contrôle d’exploitation d’une compagnie aérienne. Air Algérie est évaluée chaque deux ans par cet organisme. A chaque audit, c’est un succès.

Il faut savoir que le pavillon national n’a aucune restriction à l’international. Si la compagnie nationale n’était pas sûre, elle serait naturellement interdite en Europe par exemple. Vu le timing, c’est peut-être une campagne qui vise Air Algérie.

Aussi, il y a le contrôle SAFA (SafetyAssessment of Foreign Aircraft). Ce sont des inspections qui ont pour but de vérifier la bonne application des normes internationales de l’OACI (Organisation de l’aviation civile internationale), principalement les annexes 1, 6 et 8 de la Convention de Chicago, à l’aide d’une check-list composée de 54 éléments.

Nos avions sont fréquemment contrôlés par Les inspecteurs SAFA. A ce jour, rien d’anormal à signaler. Par conséquent, ce ne sont pas les classements publiés par certains sites qui vont porter atteinte à l’image d’Air Algérie.

Après la reprise des vols domestiques, la compagnie Air Algérie est-elle prête à la reprise des vols internationaux?

Air Algérie est une compagnie nationale qui existe depuis très longtemps. Son actif s’élève à des millions de vols. Reprendre les vols internationaux, après un arrêt de dix mois, ne posera pas de problèmes.

Bien au contraire, nous ne sommes pas mis en hibernation pendant cette période. Nous avons développé beaucoup de choses, notamment le développement d’un protocole de prévention en collaboration avec les institutions de santé nationales et internationales.

Si les hautes autorités décidaient qu’il y ait reprise, nous serions prêts. D’ailleurs, la dernière phase de rapatriement était assez chargée avec des vols quotidiens et réguliers vers plusieurs pays comme la France et l’Italie. Nous les assurons sans le moindre problème.

A ce titre, quel est le bilan de la reprise des vols domestiques?

Les vols augmentent progressivement. Grâce à cette reprise, trois nouveaux vols vers et depuis Alger ont été lancés. Je peux citer les vols Mecheria / Alger, El Bayadh / Alger et Tiaret / Alger.

Depuis le 6 décembre, nous avons enregistré un taux de remplissage de 40%. Les gens commencent à reprendre doucement leur habitude de voyager.

Qu’en est-il des pertes causées par la crise du coronavirus?

Pour les pertes, le chiffre a été communiqué. Nous avons enregistré un manque à gagner qui s’élève à 40 milliards de dinars, soit près de 300 millions de dollars. C’est à la fois énorme et désolant car nous étions sur une bonne lancée.

Aussi, des investissements ont été négativement impactés. Ils auraient dû être réalisés durant cette période (du confinement), à l’instar de l’acquisition de nouveaux appareils. Cependant, Air Algérie compte se redéployer autrement.

Quel a été l’impact de la crise du coronavirus sur les emplois?

Justement, nous avons préservé les emplois au détriment d’autres investissements.

Y aura-t-il un impact sur les prix des billets?

Nous n’avons pas de visibilité pour le moment. Il faut savoir que les prix des billets obéissent à la loi de l’offre et la demande.

En Algérie, il n’y a pas de monopole dans le domaine de l’aviation. Vingt-cinq compagnies internationales opèrent sur le marché local. Rien que sur le marché Algérie / France, il y a au moins quatre compagnies. Air Algérie ne fixe pas donc ses prix d’une manière arbitraire.

Comment Air Algérie compte récupérer le manque à gagner?

Il n’y a pas de secret, il n’y a pas de miracle non plus ! Si la reprise est décidée, nous devrons essayer de récupérer ce que nous avons perdu comme chiffre d’affaires. Cela passe inévitablement par la recherche d’autres marchés et d’autres destinations en Afrique essentiellement.

Cette période d’arrêt, à cause du coronavirus, a été bénéfique pour Air Algérie. Car nous avons pu mesurer notre potentiel. Nous avons pu aller aux Etats-Unis en effectuant trois vols. Mais, je le répète, le critère le plus important reste la rentabilité du vol.

L’on parle de l’inauguration de vols vers le Gabon et le Cameroun, est-ce de ces deux dessertes qu’il s’agit ?

Pour Libreville (capitale du Gabon) et Douala (capitale économique du Cameroun), les deux projets font leur chemin. Ils seront concrétisés.

Quand des vols réguliers vont relier l’Algérie aux Etats-Unis?

Le premier volet à prendre en considération, c’est bien évidemment celui commercial. Est-ce que l’opération sera bénéfique pour la compagnie ? Est-ce qu’elle sera rentable ? Il faut, quand même, que nous puissions remplir l’avion dans les deux sens.

L’aspect technique, nous l’avions réussi en réalisant les trois vols. Reste maintenant, la rentabilité, mais aussi l’aspect organisationnel qui se caractérisent par des négociations et des autorisations. La question ne dépend pas uniquement d’Air Algérie.

Est-ce que les opérations de rapatriement seront élargies à d’autres pays?

Nous sommes à la sixième phase des opérations de rapatriement. La première opération a commencé quand le président de la République, AbelmadjidTebboune, avait ordonné le rapatriement des étudiants algériens, maghrébins et africains bloqués à Wuhan (Chine).

C’était une opération qui avait duré vingt-huit heures, et qui avait nécessité la mobilisation de deux équipages. Par la suite, nous avons lancé d’autres opérations car des Algériens étaient bloqués sur les cinq continents du globe. Nous avons pu rapatrier 40 000 Algériens.

Suite à un constat qui a été fait par M. Kamel Beldjoud, ministre de l’Intérieur, dont les services ont recensé plus de 25 000 Algériens qui souhaitaient rentrer au pays, d’autres opérations ont été lancées.

Nous restons attentifs aux recommandations et orientations des pouvoirs publics.

L’activité du fret aérien a prospéré durant la période du confinement, pouvez-vous nous en dire davantage ?

Comme dit l’adage : « Le malheur des uns fait le bonheur des autres ». Durant cette période, notre filiale cargo n’a pas chômé. Quatre avions ont été convertis en avions cargo.

Certes, certains opérateurs nous ont reprochés d’avoir augmenté nos prix qui ont doublé. Mais, une explication existe : avant le confinement, les marchandises étaient envoyées dans les soutes des avions de transport de passagers. Les vols étaient rentables, à la base.

Depuis la fermeture de l’espace aérien, huit avions sont dédiés exclusivement à cette activité. Ce n’est pas rentable pour Air Algérie de transporter des marchandises dans un sens pour que l’avion revienne vide.

Pour que la ligne soit rentable, il faut la mobilisation de tout le monde y compris les opérateurs économiques.

Nacereddine BENKHAREF